Il n’est pas possible que la pauvreté profonde n’éprouve pas le besoin et ne trouve pas l’occasion de sa manifester au-dehors.
Elle le fait presque toujours au contact des « pauvres ».
Le « pauvre » est quelqu’un qui est dans le « besoin ». C’est quelqu’un qui appelle, même s’il l’ignore, l’aide de Dieu. Et Dieu le désigne à l’attention de l’un des siens qui deviendra l’instrument de sa bonté. Le « prochain » du pauvre, son frère au nom de Dieu. Le Christ a aimé le pauvre. Il est venu lui apporter cette bonne nouvelle inouïe qu’il n’était pas un condamné, un abandonné : une voix soudain le tire de sa solitude ; si invraisemblable que cela soit pour lui, le pauvre apprends qu’il est aimé, quelqu’un le connaît, l’appelle par son nom. C’est Jésus, c’est Dieu. Et, de la part de Dieu, un ami de Dieu.
Dieu même le premier, pour se faire entendre, pour être proche et devenir l’exemple des siens, s’est fait pauvre Lui-même. Il n’a pas voulu même une pierre pour reposer sa tête. Il n’a pas eu de toit à lui, Il s’est privé de ce que la nature accorde à l’oiseau ou à la bête des champs : un nid, une tanière. Il a même accepté qu’on le dépouille de ses vêtements, qu’on jette sa tunique aux soldats qui se la partagent, Il est monté nu et Il est mort sur la croix.
Désormais tout pauvre se reconnaîtra dons dans son Dieu et tout homme pourra reconnaître Dieu dans le pauvre. « J’étais nu », dira-t-Il au jour du Jugement, « j’étais malade, j’étais sans vêtements, j’étais seul… » Lui, c’étaient les pauvres dans lesquels les amis de Dieu l’auront reconnu pour leur joie éternelle, et dans lesquels d’autres l’auront méconnu, se condamnant eux-mêmes. Lorsque dans le monde un homme que la foi éveille à la pauvreté radicale (…) rencontre la pauvreté effective dasn la personne de son Dieu, l’illumination qui se produit en lui est irrésistible. Elle peut prendre l’allure d’une douce et immédiate exigence comme une lumière du jour qui s’installe ; elle peut saisir soudain l’âme en sa profondeur comme l’éclair aveuglant d’un coup de foudre. (…)
Il y a tant de façons de « rencontrer » la pauvreté qui ne sont pas encore ou ne sont pas du tout chrétiennes. Finalement, une rencontre mérite ce nom à partir du moment où se découvre à nous l’identité de Jésus et du pauvre, la coïncidence de la pauvreté et de Dieu dans le Christ. [1]