Ainsi c’est exprimé l’Apôtre Pierre chez un païen, un centurion de l’armée romaine à Césarée. En ce jour de Pâques, Jésus vient nous révéler un signe extraordinaire qui nous donne de continuer notre pèlerinage aux sources de notre vie chrétienne : c’est celui du témoignage. Il se trouve que le témoignage de Pierre que nous avons entendu ne s’est pas accompli dans le petit cercle des amis pétrinien, mais il est sorti au-delà même des frontières légitimes pour un juif, puisque Pierre est allé dans une maison d’un centurion, d’un païen.
Mais avant de rendre témoignage de l’Espérance qui l’anime, Pierre a eu à progresser. C’est pourquoi, regardons quelques instants le cheminement qu’a fait saint Pierre depuis le jour de la résurrection du Seigneur.
L’évangile nous montre cette scène étonnante où, sur les paroles de Marie Madeleine, deux Apôtres, Pierre et le Disciple que Jésus aimait, partent en courant vers le tombeau. « On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a mis », il est vrai qu’en entendant cela il y avait de quoi être inquiet. Remarquons que c’est une inquiétude qui met en mouvement les disciples qui partent en courant là où ils en étaient restés : au tombeau. Est-ce seulement pour aller constater une effraction ? Ou bien n’y a-t-il pas quelque chose de supplémentaire, de plus profond ? « Notre cœur n’est-il pas tout brulant ! » doivent se dire les deux disciples en courant. « Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas vu que, d’après l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts », nous dit l’évangile. L’arrivée auprès du tombeau vide, l’entrée dans celui-ci, nous dit quelque chose sur la réalité du chemin de foi. Cela donne à penser que le cheminement de foi est différent suivant les personnes. La même vision n’a pas le même effet. Pierre constate ; le Disciple que Jésus aimait voit et croit !
Chers frères et sœurs, cet événement n’atteste-t-il pas l’unicité de la personne, au sein de la communauté, face à la réalité de foi ? La dignité de l’homme s’exprime dans le fait que son cheminement de croyant est unique tout en étant porté par la communauté qui l’entoure. Nous sommes donc appelés à nous porter mutuellement pour que chacun puisse courir vers le tombeau vide du Christ ressuscité afin de voir et de croire. Nous pourrons alors ensuite rendre témoignage : le Christ est vraiment ressuscité. C’est le cheminement pratiquement instantané du Disciple que Jésus aimait, c’est le cheminent plus long de Pierre. En effet, le Disciple que Jésus aimait a une démarche spirituelle, alors que Pierre a plus une démarche incarnée qui a besoin de rencontrer, de faire l’expérience de la présence du Ressuscité dans la réalité de l’incarnation de sa vie.
Après avoir fait, nous aussi, cette expérience de la présence de Jésus ressuscité dans notre vie, nous sommes appelés à rendre témoignage de la vérité. Pour être authentique, ce témoignage doit être rendu non seulement par notre vie mais également par nos paroles. « L’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres ou s’il écoute les maîtres, c’est parce qu’ils sont des témoins » a pu dire le Pape Paul VI. Pour conduire au Christ, ce témoignage doit s’énoncer dans l’attestation joyeuse, mais aussi dans un dialogue authentique de la raison. Le futur pape François invitait, il y a quelques mois, à retrouver un langage simple, dépouillé (franciscain), une parole humble, avec un cœur brûlant afin d’ouvrir l’accès de notre monde de Dieu. « Il ne suffit pas que notre vérité soit orthodoxe et notre action pastorale efficace. Sans la joie de la beauté, la vérité devient impitoyable, froide et orgueilleuse, ce que nous voyons dans le discours de nombreux fondamentalistes amers. » (card. Jorge Mario Bergoglio - Homélie de la messe chrismale, 21 avril 2011). [1]
Mais ce témoignage explicite de la vérité doit aussi s’incarner dans la réalité de notre vie qui a besoin de signes. C’est pourquoi le témoignage de foi passe également par la réalité des sacrements et de la liturgie. La communauté rassemblée au nom de Jésus vient dire au monde la joie d’une vie vécue dans la charité fraternelle. En nous recentrant sur l’essentiel qu’est le Seigneur Jésus ressuscité, en montrant que nous formons une famille, un corps avec différents membres mais unis dans et par le Seigneur Jésus, alors nous serons un signe prophétique avec l’aide de la grâce de Dieu.
Chers frères et sœurs bien-aimés, le pèlerinage aux sources de notre foi ne s’achèvera jamais. Mais recevons du Seigneur ressuscité les différents signes qu’il nous laisse afin de les porter au monde. Ils sont prophétiques et nos contemporains ont un immense besoin de les voir.
- Il y a eu le service du lavement des pieds : Dieu s’abaisse et nous envoie dans le service vers tous nos frères les hommes en leur apportant Jésus-Christ. Le chrétien n’est pas membre d’une ONG, il est disciple de Jésus.
- Il y a eu le signe éclatant de la Croix : Dieu nous révèle la plénitude de son Amour et nous apporte le salut. Le chrétien doit être témoin de l’Espérance qui donne un sens à toute vie.
- Il y a eu le signe de l’attente conduisant à l’accueil de la Lumière : Jésus est vraiment la lumière qui brille dans les ténèbres et que les ténèbres ne peuvent pas arrêter. Le chrétien doit être cette lumière de la vérité qui éclaire le monde contemporain.
- Il y a ce signe merveilleux du témoignage qui nous est confié par l’Église et qui doit être rendu non seulement par nos vies et nos paroles, mais également dans la liturgie et la célébration des sacrements. Le chrétien est celui qui est envoyé par le Christ et l’Église afin d’annoncer au monde la Bonne Nouvelle du Salut.
Que le Vierge Marie intercède pour nous afin que nous puissions vivre cela dans une vie toujours plus unifiée là où le Christ nous a plantés.
Amen