Si nous lisons pleinement l’évangile, nous voyons tout de même que Jésus, dans l’admiration, répond à cette femme : « Femme, ta foi est grande, que tout se fasse pour toi comme tu le veux ! », ce qui conduit à la guérison de la fille de la Cananéenne. C’est pourquoi, il semble fondamental de ne pas en rester à une lecture affective, mais d’essayer de descendre en profondeur dans les versets que la liturgie met sous nos yeux aujourd’hui.
Qu’il me soit permis de relever trois étapes.
Tout d’abord, il y a le silence de Jésus. Alors qu’une femme vient le supplier de guérir sa fille possédée, Jésus semble ne pas réagir. L’évangéliste dit clairement : « Mais il ne lui répondit rien ». Cela nous invite à nous interroger sur le silence de Dieu. Tout au long de l’histoire de l’humanité, c’est une question souvent récurrente : Pourquoi Dieu semble-t-il faire silence fasse à la détresse humaine ? Est-ce à dire qu’il se désintéresse de nous en restant bien tranquille sur son nuage ? Le mystère du silence de Dieu est quelque chose de très préoccupant. D’ailleurs cela suscite aussi un refus de Dieu : « Puisque Dieu ne fait rien, puisqu’il se tait c’est qu’il n’existe pas ! » Réflexion un peu péremptoire et bien pratique pour se débarrasser de Dieu.
Mais remarquons que l’évangile vient nous donner la réponse à cette question. C’est la deuxième étape. En effet, continuons notre lecture : « Les disciples s’approchèrent pour lui demander : ″Donne-lui satisfaction, car elle nous poursuit de ses cris !″ » Si l’intention profonde des disciples n’est peut-être pas tout à louable, ils en ont assez de cette femme qui leur crie dans les oreilles, leur démarche nous montre que Dieu veut avoir besoin de médiations pour venir nous dire combien nous avons besoin des uns des autres. Dieu prend notre liberté au sérieux. Il veut que nous soyons responsables non seulement de nous-même mais également des autres en sortant notre égoïsme pour nous mettre à leur service. Face à cette détresse humaine, la grande médiation qui nous sauve est celle du Seigneur Jésus, Dieu fait homme, qui vient non pas pour supprimer la souffrance, ni même pour l’expliquer mais pour la remplir de sa présence.
Chers frères et sœurs, oui, Dieu a le souci de l’homme ! Oui, Dieu entend quand l’homme crie vers lui ! Oui, Dieu répond à l’homme ! Mais l’homme écoute-t-il la réponse que lui donne le Seigneur ? L’homme cherche-t-il à discerner les signes des temps qui lui permettent d’entre dans ce que lui dit le Seigneur ? L’homme est-il prêt à écouter les prophètes de notre temps qui invitent à la conversion, ou bien les utilisent-ils pour son propre profit ? Et nous, sommes-nous prêts à nous tourner dans la foi vers le Seigneur et à le supplier pour être à notre tour prophètes de la vérité de l’Évangile de la Vie auprès de nos frères ?
Après leur demande, les disciples s’étaient attirés une réponse déstabilisante, donnant l’impression d’une exclusivité du salut : « Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues d’Israël ». Jésus provoque la foi de ses disciples. C’est ainsi que nous entrons dans la troisième étape de cette péricope évangélique. C’est l’étape de l’acte de foi. Et dans un dialogue tout à fait étonnant, nous voyons la grandeur et la beauté de la foi à laquelle nous sommes tous appelés : « Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants pour le donner aux petits chiens. - C’est vrai, Seigneur, mais justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres. » Alors que les disciples ne disent plus rien, la foi de cette femme qui ne se laisse pas démonter émerveille le Seigneur qui accède à sa demande.
Chers frères et sœurs bien-aimés, l’évangile de ce dimanche nous montre avec force que la démarche de foi n’est pas accessoire à la vie mais qu’elle est essentielle. C’est dans la foi que l’homme découvre la grandeur de son être en s’ouvrant la vie qui lui est donnée par Dieu. C’est dans la foi que l’homme approfondit le sens d’une vraie liberté qui le conduit à choisir d’aimer, quelques soient les circonstances, comme le Christ l’aime. C’est dans la foi que nous pouvons supplier le Seigneur en offrant nos vies pour l’annonce de la Bonne Nouvelle et la conversion des pécheurs.
Accompagnés et soutenus par la Vierge Marie, soyons « Enracinés et fondés en Christ, affermis dans la foi », pour reprendre le thème des Journées Mondiales de la Jeunesse, nous donnerons alors un sens à notre vie « pour la Gloire de Dieu et le Salut du monde ».
Amen